© Timo
Wagner
J’ai plongé. Comme ça, sans raison. Trop plein de déraison.
La passion, ça te dévore le cerveau, putain ! Ça te
ratatine les neurones. Tout est trop brillant. Et tout devient trop terne.
Partout y a des bruits que tu voudrais faire taire. Et tu
voudrais hurler par-dessus ce vacarme. Gueuler qu’ils se taisent, bordel !
Pour retrouver le silence.
Mais le silence, ça t’oppresse. Ça fait tourbillonner les
objets autour de toi. Ça t’emporte dans le néant. Le silence ça te poursuit. Ça
t’englue. Ça te fait paniquer.
La passion ça rend con. Ça donne des insomnies. Ou des
cauchemars, selon. Mais de toute façon, ça empêche de dormir. T’arrive plus à
respirer.
Ça te file une sacrée gueule de bois. Et ça te laisse un
goût pâteux dans la bouche. C’est comme si t’avais pris un uppercut en plein
dans le bide. Ça te plie en deux et ça te fait voir des étoiles.
Ça t’envoie dans un espace-temps que tu comprends même pas.
Dans un monde qui ressemble à celui dans lequel tu vivais mais qui n’a plus
rien à voir. Tu regardes partout mais tu reconnais plus rien, bon Dieu ! Ça
tourne, ça virevolte, t’as l’impression de danser mais ça te colle la nausée.
Elles sont belles les couleurs autour, un peu trop criardes. Elles t’explosent
la pupille, l’iris et tout ce qui te permet d’y voir clair.
Alors j’ai plongé, tu comprends. Fallait que ça s’arrête,
tout ça. Fallait noyer l’ivresse. Fallait faire prendre l’eau à l’engloutissement.
C’était plus possible de plus avoir prise sur rien, de voir
glisser sur moi. C’était plus supportable.
Alors j’ai sauté, tu vois. Je voulais mettre fin à tout ça. Je
voulais que ma tête se calme. Que le sang ne fasse plus qu’un tour. Que mon cœur
me pince plus. Que ma peau ne réclame plus ses mains, ma bouche ses baisers.
J’ai voulu tout stopper.
Alors j’ai plongé.